Les deux premières générations :
La première génération, entre deux styles :
Si l’on peut cerner, dans les grandes lignes, l’évolution de la société musicale de ce début du XIX° siècle, le style romantique quant à lui est loin d’être identifiable. Si les suggestions littéraires ont une grande importance dans le langage musical, celui-ci ne marque pas
de ruptures avec le passé. Les structures musicales de Mozart et Haydn servent toujours de modèle et de référence et s’en trouveront bouleversés seulement par une harmonique plus audacieuse, une expression plus intense et une dynamique rythmique plus forte.
Des formes nouvelles naissent, certes, mais une réelle « opposition » entre le style ancien (classique) et le style nouveau (romantique) apparaîtra dans les années 1830 et avec elle les premières écoles nationales.
Seul Beethoven devient une figure emblématique en assurant la transition entre ces deux époques. La seconde génération (1830-1850) voit en lui un symbole qui a su éliminer le rationalisme pour arriver à une plus grande intériorité. En outre, ses innovations musicales sont si audacieuses
qu’elles ne trouveront un écho qu’au début du XX° siècle.
Quant à Schubert, il ne chercha pas comme Beethoven, à révolutionner le langage musical ; il fit seulement éclater les structures classiques
en une série d’images isolées. Cette dimension prit toute son expression à travers le lied. Avec et grâce à Schubert, le lied occupa une place relativement importante tout au long du XIX° siècle.
Pour citer quelques noms importants de cette première génération, qui furent malheureusement un peu oubliés par l’histoire :
- Auteurs de lieder : Reichardt (1752-1814), Zelter (1758-1832),
Loewe (1796-1869), Mendelssohn, Schumann, Weber
- Répertoire pianistique : Clementi (1752-1832), Dussek
(1760-1812), Field (1782-1837), Cramer (1771-1858), Hummel (1778-1837), Czerny (1791-1857), Thalberg (1812-1871)
- Ecole de violon : Baillot (1771-1842), Rode (1774-1830),
Kreutzer (1766-1831), Paganini (1782-1840)
Beethoven : Sonate à Kreutzer, page de couverture édition originale
La seconde génération : entre l’Allemagne et la France :
C’est vers 1830 que s’opéra un tournant dans l’esthétique musicale, particulièrement en Allemagne. Cette nouvelle génération qui n’avait pas connu la Révolution considérait cette époque comme révolue et appartenant à l’Histoire. De plus, en quelques années
disparurent toutes les personnalités artistiques ayant marqué la période précédente : Beethoven, Schubert, Goethe, Rossini (qui disparut de la scène musicale).
Les acquis de la première génération se développent eux aussi. Avec la renommée internationale de Paganini et Liszt, le récital devint de plus en plus populaire et apparaît cette notion de virtuosité transcendante. Les recherches sur la musique ancienne deviennent monnaie fréquente
et les premiers spécialistes deviennent célèbres avec Baini (Italie), Kiesewelter (Allemagne), Fétis (France).
Schubert & son père jouant un quatuor à cordes
Ces grandes caractéristiques musicales sont dues à plusieurs compositeurs qui font l’objet d’une étude personnalisée afin d’établir leur apport au sein de la transformation du langage musical. Néanmoins, en voici une rapide synthèse.
Schumann fut l’interprète le plus conscient des tensions agitant son époque, aussi bien dans ses écrits que dans sa musique. Sa production, touchant à tous les genres musicaux, était avant tout modelée par son intuition fantastique et son âme tourmentée.
Mendelssohn, lui, cherchera la perfection formelle, tant dans les pièces brèves (Lieder ohne Worte) que dans les concertos, symphonies. Perfection que l’on retrouve aussi dans l’intimité et la grandiloquence des pièces de Chopin.
Berlioz et Liszt sont, eux, les principaux représentants de la musique descriptive, le premier par ses symphonies, le second par ses poèmes symphoniques. Il est à noté que le poème symphonique se présente comme une forme idéale développant la tendance
à rechercher une interdépendance entre les éléments structurels de la musique (mélodie, harmonie, rythme) et le « timbre ». Berlioz fut d’ailleurs célèbre pour ses recherches de timbres et d’effets. L’orchestre en lui-même subit alors des modifications, s’en trouvant amplifié, enrichi de nouveaux instruments (piccolo, cornet à piston, cor anglais, clarinette basse, ophicléide, harpe,
orgue, cymbales, cloches, grosse caisse) et augmente en puissance sonore.
Liszt dirigeant (caricature)