Alfred Schnittke (1934 - 1998)
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Né
près de trente ans après son homologue russe, Dimitri Chostakovitch, Schnittke est considéré par le monde musical comme son successeur naturel. Héritier de Prokofiev et de l’école sérielle, Schnittke évoluera vers un langage polystylistique. Très engagé spirituellement, il excelle dans
les domaines de la musique de chambre, avec un goût très prononcé pour le violon.
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Alfred Schnittke est né à Engels, dans le district de Saratov, le 24 novembre 1934. Son père, un journaliste-interprète issu d’une famille juive originaire de Russie, et sa mère, une allemande de la Volga né en Russie, lui font commencer son éducation musicale en 1946 à Vienne avec l’étude du piano.En 1948 toute la famille s’installe à Moscou où
le jeune Schnittke travaille la direction chorale à l’Ecole Musicale de Moscou (1949-1953). Son enseignement prend suite au Conservatoire de Moscou (1953-1958) avec Goloubev comme professeur de composition et Rakov pour l’instrumentation. Il enseignera d’ailleurs dans ce conservatoire la composition instrumentale et la lecture de partitions pendant plusieurs années (1961-1972).
Dès
ses premières œuvres, Schnittke se montre l’hériter de Prokofiev et Chostakovitch (Concerto pour violon n°1, 1957 ; Sonate pour piano et violon n°1, 1963), mais il va tourner très vite vers le langage sériel de Berg et Bartók (Quatuor à cordes n°1, 1966 ; Concerto pour violon n°2, 1966 ; Sonate pour piano et violon n°2 « Quasi una sonata », 1968).
Il
emprunte ensuite plusieurs directions et en fera sa marque de fabrique. Son écriture polystylistique évoque des recherches dans les domaines du timbre, du collage (Concerto grosso n°1, 1977), l’influence de Bruckner (le post-romantisme de sa Symphonie n°2 « St-Florian » avec voix solistes, chœur de chambre et orchestre, 1979), et de compositeurs tels que Lutoslawsky (Symphonie n°1, 1969-1972 ; Quintette avec piano, 1976 ; Quatuor
à cordes n°2, 1980).
Il rend également plusieurs hommages, notamment à Mozart (Suite dans le style ancien pour violon et piano ou clavecin, 1972 ; Moz-Art, 1976-1980), Chostakovitch (Praeludium in memoriam Dimitri Chostakovitch, 1975) et Stravinsky (Dédicace à Stravinsky, Prokofiev et Chostakovitch, pour piano à six mains, 1979).
Schnittke vit essentiellement de ses compositions et musiques de film, toutes construites dans son langage polystylistique, car une même œuvre peut comporter plusieurs couches superposées dotées chacune d’un style disparate. Ainsi, Schnittke se tourne t-il vers l’éclectisme, raffiné, empruntant au baroque, au classicisme, au romantisme et au folklore.
Pourtant, si Schnittke obtient une
renommée internationale, il connut néanmoins des débuts difficiles, suite au climat politique soviétique d’alors – par exemple, sa première symphonie (1972) fut bannie par l’Union des compositeurs.
En 1985, Schnittke est victime d’une attaque cérébrale, le laissant dans le coma. Son état était tel qu’il fit déclaré cliniquement mort à plusieurs reprises. Toutefois, le compositeur se rétablit
et se remet au travail avec une santé très fragile. En 1990, il quitte la Russie pour s’installer à Hambourg. Il subira encore d’autres attaques cérébrales avant que celles-ci eurent raison de lui le 3 août 1998.
Héritier de Prokofiev
et Chostakovitch, hommages rendus aux maîtres anciens, le style musical d’Alfred Schnittke peut également faire pense à Beethoven, Mahler ou Brahms. Aussi, son
apport dans le monde musical n’est pas à négliger car il fit entrer cette avant-garde occidentale dans la musique soviétique. Il a su se démarquer par son esthétique très personnelle, néoromantique et antimoderniste. Aux côtés de Denisov et Goubaïdoulina, Schnittke est un des compositeurs russes contemporains les plus joués dans le monde.