Sofia Goubaidouina (1931 - /)

 

Sofia Goubaidoulina est l’une des figures majeures féminines de la musique contemporaine. Sa musique, émouvante et mystique, a su rapprocher l’Orient et l’Occident. Elle manie avec brio des instruments insolites et sonorités peu communes dans un langage musical où se mêlent les techniques les plus recherchées, usant de microtons et de structures rythmiques générées par ordinateur.

 

« Dimitri Chostakovitch et Anton Webern sont les deux compositeurs qui ont eu la plus grande influence sur mon travail. Bien que ma musique n'en laisse rien paraître, ces deux compositeurs m'ont enseigné la leçon la plus importante de toutes : être moi-même».

   Née le 24 octobre 1931 d’un père tatare (Asie centrale) et d’une mère russe, Sofia Goubaidoulina suit des cours de piano et de composition au Conservatoire de Kazan puis entre au Conservatoire de Moscou, où elle sort diplômée en 1961 ; elle étudia notamment avec Nicolaï Peïko (assistant de Chostakovitch) et Vissarion Chebaline (compositeur, pédagogue et musicologue).

En 1975, Sofia Goubaidoulina fonde en compagnie des compositeurs Viatcheslav Artiomov et Viktor Sousline, l'Ensemble Astreya qui improvise sur des instruments rares provenant de Russie, du Caucase, d'Asie centrale et d'Asie de l'Est, ainsi que sur des instruments rituels. Ces sons et ces timbres inconnus ont très fortement influencé son écriture.

De 1963 à 1991, elle s’établit à Moscou et gagne sa vie en tant que compositrice indépendante. Depuis, elle est installée en Allemagne à proximité de Hambourg où elle vit encore aujourd’hui.

 

Musicalement, son influence première fut celle de Chostakovitch, dont elle se libère assez rapidement pour créer un style d’écriture qui lui est bien particulier. Son univers musical est désormais empli de mysticisme et de symbolisme (In Croce pour violoncelle et orgue, 1979). Son Concerto pour violon, Offertorium, la rendra célèbre en 1980 grâce à l’interprétation de Gidon Kremer.

Elle associe également à ses œuvres son goût inné pour la poésie (allant de l’Egypte antique à Anna Akhmatova) avec la Nuit à Memphis (1969), Hommage pour soprano et octuor (1987) ou Percussio di Pekarski pour percussion, mezzo-soprano et orchestre (1976). Se mêle aussi sa quête de la transcendance comme elle nous le confie avec Perceptio pour soprano, baryton et cordes (1981-1983) ; ouvrage dans lequel elle poursuit ses recherches de la narration musicale en usant d’un lyrisme aigu, d’un discours hachuré en contrepoint de multiples silences mais sans rien altérer de la continuité intérieure.

Son goût pour les formations hétéroclites est lui aussi indéniable, avec Vivente-non vivente pour synthétiseur et bande (1970), Concordanza (1970), les Sept Paroles pour violoncelle, accordéon et cordes (1982), Silenzio pour accordéon, violon et violoncelle (1991). Même si elle n’oublie pas les formations traditionnelles avec Instant de l’âme pour mezzo-soprano et orchestre sur des vers de Marina Tsvetaieva (1974), Introïtus – concerto pour piano et orchestre (1978), Réjouissez-vous pour violon et violoncelle (1981), Jetz immer Schnei pour ensemble et chœur de chambre (1993), Concerto pour flûte, cordes et percussion (1994), Impromptu pour flûte, violon et orchestre (1997) et quatre quatuors à cordes.

 

L’œuvre de Sofia Goubaidoulina est ainsi riche et variée, mêlant les influences les plus diverses ; c’est aussi à cela qu’on la reconnaît facilement. Elle composa également de nombreuses musiques de film et reçut de nombreux prix, notamment le prix au Concours international de composition de Rome (1975) et le prix de composition de la Fondation Prince Pierre de Monaco pour l’ensemble de son œuvre (1987), le Prix international du disque Koussevitzky (1989 et 1994), le Prix Franco Abbiato (1991), le Heidelberger Künstlerinnenpreis (1991 ) et le Prix de l'Etat russe (1992).