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Francis Poulenc (1899 - 1963)

 

photo de Poulenc

Francis Poulenc a apporté une large contribution à l’esthétique néoclassique qui se développe à Paris dans l’entre-deux-guerres. Son adhésion au Groupe de Six et son langage musical en marge des courants avant-gardistes de l’époque font de lui un compositeur original. Ses œuvres s’efforcent de traduire avec précision et ironie le caractère du courant impressionniste. Toutefois, malgré un grand sens de l’humour et un goût certain pour l’ironie, qui sont des caractéristiques majeures de son œuvre, Poulenc dote celle-ci parfois d’une veine mélancolique mais toujours très française.

 

Les années de formation :

Francis Poulenc naît le 7 janvier 1899 dans une famille bourgeoise où l’on aimait et pratiquait la musique. Il s’assoit devant un piano alors qu’il est âgé de cinq ans seulement et très vite il acquiert une solide culture musicale : Schubert, Chopin, Franck, Beethoven, Massenet, Stravinsky et Schoenberg baignent son enfance et son adolescence.

En 1914, il devient l’élève de Ricardo Vinès qui lui fait découvrir la musique de son temps et rencontrer des personnalités importantes du monde artistique (Satie, Jean Cocteau, Manuel de Falla, Georges Auric). Mais l’année suivante, il est confronté à la mort de sa mère, et deux ans après, celle de son père. Il est alors recueilli chez sa sœur à Paris ; il ne quittera plus la capitale. Il rencontre d’ailleurs des personnalités d’avant-garde telles André Breton, Paul Eluard ou Guillaume Apollinaire.

Le 11 décembre 1917, Poulenc connaît son premier succès parisien avec la création de sa Rhapsodie nègre pour voix et ensemble instrumental (flûte, clarinette, quatuor à cordes et piano), au Théâtre du Vieux-Colombier. Ravel est présent et la pièce est dédiée à Satie, dont il va fortement subir l’influence.

Alors que la guerre va bientôt arriver à son terme, Poulenc est mobilisé en janvier 1918 et ce jusqu’en 1921. Entre temps, à l’occasion de ses permissions, il organise sa carrière de jeune compositeur, et est en contact permanent avec l’élite avant-gardiste musicale parisienne ; Jean Cocteau sollicite sa collaboration pour une fête au profit de la Croix-Rouge américaine en 1918.

Cette même année, il écrit ses premières sonates, et c’est aux instruments à vent qu’il les destine (Sonate pour deux clarinettes), et ajoute à son catalogue sa première œuvre importante, les Mouvements perpétuels pour piano créés par Vinès. Poulenc a tout juste 20 ans et est reconnu ; Stravinsky l’aide même à publier ses œuvres chez son propre éditeur londonien.

Le 5 avril 1919 est une date capitale puisque c’est lors d’un concert à la salle Huyghens où seront rassemblés les six noms du futur Groupe des Six (avec Auric, Durey, Honegger, Milhaud et Tailleferre). Dans la foulée, il se met à composer le Bestiaire, sur un recueil de G. Apollinaire. La première manifestation d’envergure du Groupe des Six va se réaliser dans un ballet Les Mariés de la tour Eiffel, qui suscitera un véritable scandale le 18 juin 1921.

 

              Francis Poulenc en 1920, par Jacques-Emile Blanche

 

Poulenc a conscience de son talent, certes, mais il sait aussi qu’il lui manque une structure compositionnelle qu’il n’a pu trouver en tant qu’autodidacte. C’est pourquoi il va suivre l’enseignement privé de Charles Koechlin (1867-1950) jusqu’en 1925. Dès l’été 1922, Poulenc écrit une Sonate pour clarinette et basson, et une Sonate pour cor, trompette et trombone, puis un ballet commandé par Diaghilev Les Biches. Il achève en 1926 un Trio pour hautbois, basson et piano (dont l’écriture avait débuté en 1921), et en mai de la même année, il fait entendre les Cinq Poèmes de Ronsard, le Trio et les Gaillardes (chansons sur des textes grivois du XVIII° siècle). L’année 1927 est en revanche une année creuse pour le compositeur. Il revient avec succès avec son Concert Champêtre pour clavecin (interprété pour la première fois par Wanda Landowska le 3 mai 1929 à la Salle Pleyel), et Aubade, concerto chorégraphique sur une chorégraphie de Balanchine (donné le 21 janvier 1930 au Théâtre des Champs-Elysées).

 

Des années inégales :

Si les années suivantes se montrent musicalement inégales, c’est surtout dans le domaine de la musique vocale que Poulenc va s’affirmer. En 1931 paraissent trois recueils de mélodies (les Trois Poèmes de Louise Lalanne, les Quatre Poèmes d’Apollinaire et les Cinq poèmes de Max Jacob) auxquelles succèdent le Bal masqué (créé le 20 avril 1932) et le Sextuor, œuvre qui ne sera réellement achevée qu’à l’aube de la seconde guerre mondiale et crée en décembre 1940.

Dans sa musique vocale, Poulenc mêle l’ironie et la mélancolie, une double tendance qui va de pair avec son aptitude dramaturgique.

Durant l’année 1932, Poulenc reçoit une commande d’un Concerto pour deux pianos, de la princesse Edmond de Polignac, commanditaire également de Fauré (Pelléas et Mélisande), Stravinsky (Renard, 1917), Kurt Weill (première symphonie, 1921) ou Milhaud (les Malheurs d’Orphée, 1924). Ce concerto fut créé le 5 septembre 1932 à Venise. Poulenc atteint alors toute sa maturité musicale : on y trouve des rythmes à la Stravinsky, un lyrisme extraverti à la Rachmaninov, des influences des musiques balinaises et emprunte au jazz gershwinnien ; un véritable kaléidoscope musical.

Après deux années musicalement pauvres pendant lesquelles il a essentiellement écrit des pièces brèves dans lesquelles il lâche son imagination, Poulenc revient en 1935 à la musique vocale. C’est l’heure des Cinq poèmes de Paul Eluard, et des Sept chansons pour chœur a capella (1936), dont la gravité ouvre le chemin à une nouvelle période de sa vie.

 

La Vierge Noire :

Lors d’un séjour vers Rocamadour, Poulenc rencontre la foi : il visite le sanctuaire de la Vierge Noire, en est bouleversé et compose aussitôt les Litanies à la Vierge Noire, pour chœur de femmes à trois parties et orgue. Cette pièce sera créée à Londres le 17 novembre 1936 par Nadia Boulanger, puis recréée en 1948 dans sa version orchestrée.

Grâce à Nadia Boulanger, Poulenc va se familiariser avec les anciens polyphonistes qu’étaient Monteverdi, Buxtehude, Couperin ou Frescobaldi, et dès lors amène des chefs-d’œuvre choraux : la cantate Sécheresses, pour chœur et orchestre sur un poème d’Edward James, et la Messe en sol majeur, sa première œuvre de musique religieuse a capella pour la seule année 1937.

Poulenc revient au genre du concerto l’année suivante avec le Concerto pour orgue, orchestre à cordes et timbales, une nouvelle commande passée par la princesse de Polignac en 1936. L’originalité de ce concerto est que Poulenc l’a écrit dans l’esprit du style « baroque », bien que son cadre formel consiste en une succession de mouvements enchaînés au lieu de l’habituelle division en trois mouvements.

 

Des années de guerre et des lendemains difficiles :

La mobilisation générale est décrétée à l’été 1939. Poulenc écrit lors de nombreuses mélodies (Fiançailles pour rire, Bleuet) avant d’être mobilisé en juin 1940. Cela ne le perturbe guère puisque démobilisé un mois plus tard (!!!). Il décide alors de composer à nouveau de la musique symphonique, ce qu’il n’a pas fait depuis Les Biches. Jacques Rouché lui a commandé un ballet pour l’Opéra de Paris. Il s’agira des Animaux modèles, dont l’argument est fondé sur six fables de Jean de La Fontaine, créés le 8 août 1942 devant un public majoritairement composé d’officiers allemands.

 

     partition "Les chemins de l'amour", valse chantée popularisée par                                           Yvonne Printemps

 

Ces années de guerre et d’occupation virent la création d’autres mélodies (les Chansons villageoises, 1943), d’une Sonate pour violon et piano (1943), d’une musique de film (pour un film de Jacques de Baroncelli), d’une musique de scène, de motets et autres petites pièces religieuses, et une cantate de guerre Figure humaine pour double chœur a capella.

Au sortir de la guerre, Poulenc termine son opéra bouffe les Mamelles de Tirésias d’après le drame d’Apollinaire datant de 1903 (publié en 1917). Cette œuvre jouée à l’Opéra-Comique en juin 1947 est une farce irrésistible mêlant des univers surréalistes et de music-hall.

La guerre est finie, certes, mais la vie musicale n’est pas simple à reconstituer, et la plupart des projets du composteur n’aboutissent pas ou alors quelques années plus tard. Ainsi en est-il de la Sonate pour violoncelle et piano (1949) et du Concerto pour piano et orchestre (1949).

 

New York :

En 1948, Poulenc embarque pour les Etats-Unis, New York plus précisément, où sa musique commence à être appréciée. Deux années plus tard, il retrouve son inspiration religieuse et met au point son Stabat Mater, une sorte de « grand motet » avec un chœur à cinq parties « à la française », un grand orchestre et un soprano solo, et aux sonorités graves, parfois inhabituelles. Il s’agit d’une œuvre-clé dans la vie du compositeur car, à la fois elle concrétise l’évolution de son style religieux et affirme sa foi religieuse. S’ensuivent alors les Motets pour le temps de Noël (1951), Gloria pour soprano solo, chœur mixte et orchestre (1959), et son ultime œuvre chorale les Sept Répons des ténèbres (1962).

Toutefois, Poulenc inscrit toujours à son catalogue des œuvres profanes : des mélodies (la Fraîcheur et le Feu, 1950) et surtout un opéra, les Dialogues des Carmélites (1953), commandé par Guido Valcarenghi (directeur des éditions Ricordi) pour la Scala de Milan, et créé le 26 janvier 1957.

 

Les dernières années :

Les années de composition des Dialogues des Carmélites ont épuisé Poulenc, à tel point qu’il se retrouve sous anti-dépresseurs. Plutôt que de travailler sur un ouvrage au caractère léger, Poulenc s’enferme dans un projet « grave », La Voix Humaine, d’après la pièce de son ami Jean Cocteau (1930). Il en fait un long monologue d’une femme (soprano lyrico dramatique) quittée par son amant et tentant de la reconquérir. La Voix Humaine fur écrit pour Denise Duval, et créé par cette artiste à l’Opéra-Comique le 6 février 1959.

L’année suivante, Poulenc retrouve New York et donne les Mamelles de Tirésias et la Voix Humaine. Le succès est inoubliable et le compositeur français se lance alors dans une tournée de concerts. Il rentre en France quelques mois plus tard empreint d’une seconde jeunesse.

Depuis la Voix Humaine, Poulenc est en quête d’un nouveau projet d’opéra. Mais faute de livrets, il va terminer les deux sonates pour clarinette et pour hautbois esquissées deux ans auparavant. Il laisse en tout trois sonates pour bois : la Sonate pour flûte et piano (1957-1958), la Sonate pour clarinette et piano (1962) et la Sonate pour hautbois et piano (1962-1963). Cette Sonate pour hautbois sera sa dernière œuvre.

Le 26 janvier 1963, Francis Poulenc et Denise Duval donnent un récital à Maastricht. Le 30 janvier, le compositeur s’éteint, victime d’une crise cardiaque. Il repose au cimetière du Père-Lachaise.

Poulenc laisse derrière lui une musique très française, gracieuse, naturelle, mélancolique, grave et légère. Il n’était pas un symphoniste, composa peu finalement pour l’orchestre, haïssant les grandes formes et les développements thématiques au sein de sa musique. Francis Poulenc est un très grand mélodiste et laisse en héritage une centaine de mélodies sans compter les pièces chorales et religieuses qui tiennent une grande importance dans son œuvre.

Comment résumer sa musique, son esprit musical : une fraîcheur et une gaieté typiquement française et une infinie mélancolie qui traverse les partitions les plus légères.

                                                                                                                                                                            

 

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