Introduction à la musique classique :
La seconde moitié du XVIII° siècle est avant tout l’époque des « Lumières ». Les Lumières veulent une remise en cause radicale du cadre ancien et pour cela prônent la raison humaine et l’esprit critique. L’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (1751) diffuse la somme des connaissances et des réflexions à la mode. Une grande place est accordée à la musique,
dont les articles sont principalement rédigés
par J.J. Rousseau.
Ainsi, en réaction aux pathos et artifices baroques, les Lumières recherchent avant tout la simplicité et le naturel ; Rousseau se fait d’ailleurs le théoricien de cette nouvelle esthétique. Et ce retour aux sources, à la nature, s’accompagne d’un retour à l’antique.
Le passage à l’âge baroque vers le classicisme est un processus complexe. Alors que Bach meurt en 1750, les prémices d’une nouvelle esthétique se font remarquer dès 1730. Mais pendant plus d’un demi-siècle vont coexister des courants très variés, tels que le style galant, le rococo, l’Empfindsamkeit (le style sensible), le Sturm und Drang (Orages et Passions). Seulement vers 1780, débute
l’apogée de cette époque
classique. La mort de Beethoven marque symboliquement la fin du classique, mais il n’en est rien puisque un courant, étonnamment plus puissant, le romantisme, a déjà fait son apparition depuis plusieurs années.
J.S. Bach a mené à son paroxysme l’héritage polyphonique de l’école
franco-flamande et a passé
à leurs points culminants tous
les styles et formes musicales de l’époque baroque. Cependant, si Bach fut honoré de son vivant, il reçut également beaucoup de critiques. En effet, les musiciens et théoriciens de son époque tendent déjà vers une esthétique plus légère, éloignée d’une écriture trop complexe, trop polyphonique et dont la ligne mélodique est floue.
L’écriture doit
désormais être simple, avec des thèmes brefs et concis et la mélodie être prioritaire sur l’harmonie et la polyphonie de manière à être inspirée par la nature. Mais l’innovation la plus marquante de ce nouveau style est la tonalité ; car il ne faut pas oublier qu’à cette époque elle n’est pas encore fixée et ressemble davantage à un langage vivant en perpétuelle évolution.
De même, la vie musicale s’émancipe, et aux côtés de l’église et de la cour émerge une vie musicale bourgeoise où la musique se diffuse maintenant dans les lieux nouveaux : salon, café, maison, salle de spectacle. A cela naît la notion de public, pour les concerts et les opéras, le développement de l’édition musicale et
bientôt la critique. A la fin du siècle,
les bouleversements de la vie musicale sont tels que le musicien n’aura plus recours au mécénat ou d’être attaché à une cour pour vivre de son art. Il sera un musicien indépendant ; Mozart sera d’ailleurs l’un des précurseurs.
Si, sur le plus esthétique, les philosophes et théoriciens de toutes nationalités (Mattheson, Rousseau, Hegel, Scheibe…) s’accordent à dire que l’art doit imiter la nature, la géographie musicale voit se profiler de grands changements durant ces quelques années.
L’Italie, qui jusqu’à
maintenant était le pays du chant et de la musique qui dominait
en Europe, va peu à peu perdre de sa superbe. D’autres centres vont alors gagner en importance : la France et l’Angleterre sont désormais les deux nations au cœur de la vie politique et intellectuelle car Paris et Londres focalisent leurs intentions sur le développement et la diffusion de la musique et des musiciens ; et cela même s’ils manquent de compositeurs d’envergure pour rivaliser avec les talents étrangers.
Le véritable cœur musical de l’Europe est Vienne car elle attire des musiciens venus d’Italie (en particulier pour l’opéra) et des provinces germaniques et autrichiennes, lesquelles développent également de vrais petits centres, tout aussi importants, mais dont les fruits seront récoltés par Paris et Vienne.
C’est ainsi que, même si le principal théâtre
d’action de cette nouvelle période se limite à ces pays européens, il est un fait important à ne pas négliger : la musique, en se démocratisant, se simplifiant pour être plus proche de la nature, est présente dans la vie de tous les jours et traverse désormais toutes les couches de la société.
Le
langage musical classique :
La facilité est devenue la norme d’exigence de ce nouveau langage musical. Afin de s’éloigner du contrepoint, l’écriture est maintenant à deux ou trois parties, avec une distinction très nette entre la voix et l’accompagnement. Les thèmes se font plus brefs, plus directs avec une symétrie très marquée,
et le rythme s’approche
d’une régularité strophique absolue. Comme l’art imite la nature, les nouvelles recherches s’orientent vers l’ornementation, avec des trilles, des mordants, des appoggiatures, afin de maximiser les inflexions expressives.
Cette nouvelle esthétique est ce que l’on appelle le style galant. Dans les généralités,
les théoriciens s’accordent, mais selon
certains, l’appellation « galant » signifie un traitement plus libre de la fugue avec des voix supérieures davantage soumises, donc directement inspiré de la fugue (Marpug, 1750). Pour d’autres, il s’agit d’un style entre l’élevé et le vulgaire (Mattheson, 1739), ou d’un style qui suscite l’imagination (Michaelis, 1795).
Quoiqu’en
disent tous ces savants,
ce courant n’est absolument pas à minimiser. C’est avec lui qu’apparaît la fameuse basse d’Alberti, accompagnement qui propose des accords arpégés à la seule main gauche au bénéfice de la ligne mélodique, et ce phrasé si régulier et construit avec ses groupes, est généralement de quatre mesures.
Toute cette légèreté,
régularité et simplicité
sera véhiculée à travers une forme musicale bien précise : la sonate, l’une des formes qui figure parmi les plus importantes depuis lors.
La sonate en tant que forme :
Dans
le domaine instrumental, la première moitié du XVIII° siècle a été dominé par le violon. La seconde partie du siècle sera, elle, régie par un nouvel instrument, le pianoforte. Cet instrument est l’un des apports les plus importants de cette époque.
La sonate de style galant apparaît comme une composition simple et facile qui cherche à se
démarquer du contrepoint sévère.
Elle donne d’ailleurs son nom à une forme, la forme-sonate, qui se présente comme tel :
- Exposition : premier thème à la tonique – transition – second thème à la dominante.
Reprise de l’Exposition.
- Développement : dans lequel les différents thèmes sont exploités dans des combinaisons différentes et des tonalités diverses avant de revenir à la tonique.
- Réexposition :
avec le même plan formel, mais à la tonique uniquement. Il se peut parfois qu’il y ait une coda.
Il s’agit d’un schéma généraliste que chaque compositeur utilise dans ses Sonates, Symphonies, Quatuors… mais qu’il modifie à sa manière, selon son style. Ainsi, l’on trouve divers schémas de sonates
dans les œuvres pour clavier de Carl Philipp
Emmanuel Bach, les réexpositions et développements pouvant être complets ou partiels. Chez Mozart, on assiste par exemple à un vrai travail d’orfèvre dans la forme, qu’il pousse dans ses retranchements avec la présence d’au moins quatre thèmes majeurs, des développement travaillés avec des passages en contrepoint ou des thèmes réexploités à l’infini dans les réexpositions qui
n’en finissent pas.