Brian Ferneyhough est l’une des figures majeures de la scène musicale contemporaine actuelle. Son œuvre,
déjà importante,
se souligne par l’assimilation de l’histoire et des traditions et, par une conception personnelle de l’expression. Sa musique de chambre est l’une des plus riches du répertoire contemporaine, tant par sa qualité que par sa quantité. C’est une œuvre difficile, passionnante qui pose les jalons dans des domaines traditionnels, de par son écriture (référence à Monteverdi et Purcell) et par ses formes (Sonates, 1967 ; Troisième Quatuor, 1987).
Toutefois, Ferneyhough a su développer une esthétique très personnelle en regard de la tradition : la mise en relation entre ces deux mondes, l’actuel et l’ancien : « On interprète toute une tradition d’interprétation que plusieurs générations ont déjà dégagée de l’original et, quelle que soit l’innovation que l’on introduise, elle vient en contrepoint sur cet arrière-plan ».
Si ce compositeur britannique évoque la tradition musicale, il faut aussi y inclure des chefs-d’œuvres du XX° siècle, tels le Quatuor op.10 de Schoenberg, les Bagatelles op.9 de Webern, Kreuzspiel de Stockhausen ou le Livre pour quatuor de Boulez. De même, la démarche compositionnelle de Ferneyhough s’articule autour d’une pensée polyphonique particulière dans le sens où les divers éléments
musicaux présentés sont organisés de manière simultanée. Cela se ressent évidemment sur l’organisation de son discours qui est souvent organisée à partir de deux extrêmes. Ainsi, c’est de cette interaction entre ces deux mondes que naît la conception formelle et stylistique de Ferneyhough.
La naissance du Second
Quatuor à cordes de Ferneyhough est due à une commande de Südwestfunk Baden-Baden. Il fut terminé en 1980 et crée la même année par le Quatuor Arditti à la Südwestfunk.
Cette œuvre travaille essentiellement sur le silence, sa présence au sein de la syntaxe musicale : « Il s’agit dans ce morceau de silence – non pas de silence littéral (bien que ceci soit également un trait caractéristique
évident de la section d’ouverture) mais plutôt de cette absence délibérée au cœur de l’expérience musicale qui existe afin que l’auditeur puisse s’y rencontrer. Puisqu’il n’est possible d’approcher les différentes formes de silence que par le biais de leurs négatifs propres, l’organisation de ce quatuor s’efforce de définir plusieurs chemins concentriques de plus en plus resserrées convergent vers ce noyau d’immobilité ».
Contrairement à la forme classique du quatuor à cordes, en quatre mouvements, le Second Quatuor de Ferneyhough se compose d’un seul mouvement à l’intérieur duquel s’articulent quatre sections distinctes. Si la première section est ponctuée par le silence, au-dessus duquel s’enchevêtre le matériau musical du violon, le silence va se garnir au fur et à mesure des onze minutes du quatuor, d’un matériau
secondaire qui va instaurer une polyphonie progressive entre les quatre instruments.
Il est à noter chez Ferneyhough, comme beaucoup de ses contemporains, que le matériau musical se caractérise essentiellement par des modes de jeux différents et bien distincts (glissandos, notes répétées etc etc…), donnant ainsi à l’œuvre sa rigueur exceptionnelle. Comme les Sonatas for string quartet ou Unity Capsule pour
flûte, le Second Quatuor propose une approche originale de l’interprétation primant Ferneyhough au rang de compositeur majeur du XXI° siècle.