La Sonate n°2 op.35 pour
piano a été écrite à Nohant en 1839. Œuvre puissante et originale, cette sonate
tourne principalement autour de la Marche
funèbre, écrite par Chopin en 1837, durant l’affreux voyage aux Baléares.
Georges Sand témoigne des visions morbides du compositeur pendant qu’il
esquissait sa Sonate à Majorque.
Durant l’été 1839, Chopin écrit à son ami Fontana : « Je compose ici une sonate en Si bémol
mineur dans laquelle sera la Marche
Funèbre que tu connais. Il y a un Allegro ; puis un Scherzo en Mi bémol
mineur, la Marche et un court finale de trois
pages environ. Après la Marche, la
main gauche babille unisono avec la main
droite. »
L’œuvre fut mal reçue, voire incomprise, et elle fit couler beaucoup d’encre.
Bien que révélant un « économie formelle », elle présente dans ses
quatre mouvements, une vision saisissante des quatre visages de la mort. La Sonate en Mi bémol mineur fut publiée en
1840 dans son entier, à Leipzig, à Londres et à Paris, sans dédicataire.
Analyse :
La Sonate n°2 op.35 en Mi bémol mineur se compose de quatre mouvements :
1. Grave - Agitato
2. Scherzo
3. Marche
funèbre : Lento
4. Finale
Premier mouvement :
Grave – Agitato
Avant tout chose, une longue phrase de quelques mesures d’accords se
fait entendre. S’y enchaîne très vite l’Agitato, avec un premier thème. Agité,
précipité, le premier thème est tumultueux. S’oppose le second thème, plus
lyrique et paisible. Après une brève transition « sostenuto », le
premier thème revient en Fa dièse mineur puis amorce le Développement. Bref et
dramatique, tous les éléments y sont exposés dans une écriture harmonique
complexe digne de Chopin. A la réexposition, Chopin sort des conventions
formelles en omettant le premier thème et en présentant directement le thème
secondaire. De grands accents fortissimo concluent avec éclat ce mouvement.
Second mouvement :
Scherzo
Le Scherzo est impétueux et fougueux. Ecrit en Mi bémol mineur, une belle
mélodie encadre un Trio mélancolique
et rêveur.
Troisième mouvement :
Marche Funèbre
Cette musique tristement célèbre a été composée par Chopin, en
commémoration de l’anniversaire de l’insurrection de Varsovie. Première pièce de
cette sonate à être écrite, cette Marche
progresse sur un rythme saccadé et obsédant jusqu’au chant bouleversant du Trio
central. Le thème sombre revient à la fin pour conclure.
L’élève de Chopin, Wilhelm von Lenz témoigne que « rien n’est plus facile que de faire de ce
Trio la chose la plus commune, rien n’est plus difficile que d’en enlever le charme
mélodique à la hauteur de l’affliction qui pèse sur tout le poème de la Marche
Funèbre… le Trio est une pierre de touche à laquelle on reconnaît si l’exécutant
est poète ou s’il n’est que pianiste, s’il sait parler ou s’il ne sait que
jouer du piano ».
Quatrième mouvement :
Finale
Ecrit presto, ce Finale est un immense trait rapide en
triolets d’octaves à l’unisson aux deux mains. C’est un mouvement tempétueux
qui balaie tout le clavier. Schumman commentera : « Ce n’est plus de la musique, mais un certain génie impitoyable
qui nous souffle au visage. »